Episodes de la vie de Munírih Khánum (qui signifie "remplie de lumière"), la bien-aimée femme d`Abdu'l-Bahá.
Extraits d'une Autobiographie (source : "the Bahá'í world" 1938-1940 page 259)
TEMOIGNAGE DE Munírih KhánumDés le début de ma vie, et durant toute la période de mon enfance, il y eût dans ma vie des choses merveilleuses - chacune d'elle étant un miracle portant de grands étonnements. Devrais-je expliquer pleinement chacun de ces incidents et remercier de ma bouche pour chaque grâce reçue, que j'en serais incapable et cela conduirait à de longs discours sans fin.
Mon père s'appelait Mirza Muhammad 'Ali Nahri, fils de Haji Siyyid Muhammad Hendi (Indien). Haji Siyyid Muhammad était né et vivait dans le village de Zavareh, une banlieue de Isfahan. Ayant atteint l'age de maturité il voyagea jusqu'en Inde, et bien qu'il appartenait à la famille de Mohammad, le prophète - tous les descendants de Mohammad son hautement honoré et respectés dans tous pays de l'Est - au moment venu il maria une des princesses de la famille royale de l'Inde. Le prince d'Inde, afin de devenir membre de la famille sacrée de Mohammad et par là recevoir les grâces et bénédictions spirituelles, donna sa propre fille en mariage à Haji Siyyid Muhammad qui séjournait en Inde, et pour cette raison il devint connu sous le nom de "Indien". Cette union familiale le conduisit à beaucoup de célébrité, de richesses matérielles et d'honneur, et il vécût à la manière d'un noble, d'un prince avec toute sa suite.
Après quelques temps il devint l'heureux papa de deux fils. Le premier s'appelait Haji Siyyid Mehdi qui, plus tard, devint le seul héritier de toute la fortune et des possessions de son père. Ce fils ainé voyagea de l'Inde jusqu'à Najaf (une des Cités Saintes de Karbila, en Mésopotamie) et s'y installa. Au cours de sa vie il devint possesseur de beaucoup de richesses et de biens immobiliers, fermes, maisons, hôtels, bains publiques et magasins. Ces propriétés se trouvaient dans les villes de Karbila et de Najaf. Quelques temps plus tard il dépensa un tiers de son argent pour la construction d'un aqueduc devant transporter l'eau dans des villes, et pour cette raison il reçut pour nom "Nahri" du Persan "Naht" - qui signifie un cours d'eau. Ce titre de Nahri se reporta sur sa famille, et à ce jour ses descendants sont encore connus sous ce nom.
Haji Siyyid Muhammad Hendi avait plusieurs enfants, garçons et filles. Parmi eux se trouvait mon père qui s'appelait Mirza Muhammad -'Ali Nahri, et mon oncle qui s'appelait Mirza Haji, qui en temps voulu devint le père de la femme du Roi des Martyres.
Sans même retourner à leur maison, ni même faire leurs adieux à leurs familles, mon père et mon oncle partirent pour le Mont des Biens Aimés dés qu'ils entendirent l'appel du Báb s'élever de Shiraz.
Laissez-moi, de même, vous exposer en détail quelques mots au sujet de ma grand-mère paternelle. Elle était une âme sainte et croyante, puisse l'esprit du Seigneur être auprès d'elle pour l'éternité! Une nuit, elle vit dans le monde du rêve, deux orbes sortir du puits de sa maison et rentrer dans son coeur. Elle était si excitée et débordante de joie au cours de ce rêve qu'elle sortie de son sommeil et resta éveillée tout le reste de la nuit, et avant même que le soleil ne se lève, elle s'en alla le coeur rempli de bonheur vers la maison de Haji Siyyid Muhammad Bagher. Celui-ci devint plus tard un théologien de grande importance et un homme de grand savoir dont les paroles étaient écoutées à travers tout l'Iran. Il était une perle rare et sans égal de son époque. Quand ma grand-mère lui raconta son rêve et lui demanda de l'interpréter, il répondit: "Soyez d'une humeure tranquille et heureuse car Dieu vous accordera deux enfants qui comme deux soleils lumineux illumineront et éclaireront toute votre famille directe et indirecte."
(Au cours du temps) mon père Mirza Muhammad-'Ali nacquit puis, un an et trois mois plus tard, ce fut mon oncle Mirza Haji qui naissait à son tour.
Quand mon père fut diplômé du collège ('Kaseh-Garan), il partit visiter les villes Saintes, et à Karbila s'engagea lui-même comme étudiant dans les classes de Haji Siyyid Kazim Rahdi. Il devint un ferme et enthousiaste disciple des enseignements de ce maître et de Shaykh Ahmad. Ces deux orbes brillantes resplendissent aujourd'hui dans le monde de l'existence, et furent inégalés en renommée et en connaissance. Après avoir vécu pendant quelques temps dans cette ville Sacrée, il se choisit une femme.
Alors qu'ils suivèrent les classes de Haji Siyyid Kazim, ils rencontrèrent plusieurs fois Sa Sainteté le Báb, et purent observer beaucoup de signes merveilleux et de signes apparents de son Temple Saint.
Maintenant, au sujet de mon père:En arrivant à Isfahan, tandis que sa femme vivait à Karbila, il prit une chambre au collège de 'Kaseh-Garan.
Vers cette époque Sa Sainteté Bábu'l-Báb reçu un ordre en provenance du Báb demandant de quitter Shiraz et de partir pour Isfahaan. Arrivé dans cette ville, il s'engagea dans la promotion de la Cause et guida beaucoup d'âmes dans ce Mouvement merveilleux. Parmi celles qui acceptèrent le Message ce trouvait mon père. Il fut guidé vers le chemin de la connaissance de la Foi. Après un certain temps l'infortune le toucha quand il apprit la nouvelle de l'ascenssion de sa femme vers le Royaume.
Alors qu'il était si démuni du bien-être d'un foyer, il rencontra et s'associa avec Haji Aga Muhammad, un marchand renommé de Isfahan et nouveau croyant. Il était très voué à mon père. Un jour il dit à mon père:
"Dans la mesure où votre femme est partie sans raison, ne serait-ce pas mieux pour vous d'abandonner votre chambre au collège et de venir vous installer avec nous dans notre maison. J'ai une soeur, et si cela vous plaît, je serais plus qu'heureux d'arranger un mariage entre vous afin que le lien d'amour et d'affection qui existe entre vous et notre famille puisse ainsi être renforcé."
Mon père consentit volontiers à cette sage proposition et Haji Aga Muhammad, après avoir consulté avec sa mère, vit que non seulement il n'avait aucune objection, mais qu'il était des plus impatients de conclure cette union. Sa mère dit:
"La nuit dernière j'ai vu dans le monde du rêve un homme noble (Siyyid) avec un visage lumineux qui venait dans notre maison. Il portait dans sa main deux lampes. Cette personne doit sûrement être Siyyid, et indiscutablement vous devez vous empresser de consumer ce mariage."
Puis Haji Aga Muhammad invita beaucoup d'amis à une fête de fiançailles, et sa soeur qui est aussi ma mère se fiança avec mon père. Il était bien connu que mon père n'avait pas eu d'enfant de sa première femme. Deux ans s'écoulèrent après son mariage avec ma mère, mais il n'y eu pas d'enfant. Sa Sainteté le Báb, voyageant en provenance de Shiraz arriva à Isfahan et s'installa dans la maison de Iman-Jum'ih. Mon oncle, Mirza Ibrahim, le père du Roi des Martyres et le Bien-aimé des martyres, fut appointé par Iman-Jum'ih comme hôte de sa Sainteté le Báb, pour être prêt à le servir en toutes circonstances. Une nuit il invita Sa Sainteté qui, gracieusement, accepta son invitation... Ceux qui étaient présents à cette glorieuse fête reçurent les bontés et les faveurs du Báb et écoutèrent ses paroles jusqu'à ce que le dîner fut servi. Puis tous s'assirent pour une fête spirituelle aussi bien que matérielle. Tandis qu'Il prenait part au dîner, Sa Sainteté le Báb se tourna vers une personne présente et la questionna au sujet des enfants de mon père. Cette personne répondit que, bien qu'il ait été marié deux fois, mon père n'avait pas eu d'enfant. Sa Sainteté le Báb offrit ensuite à mon père une petite quantité de bonbons. Il en mangea et il lui vint à ce moment à l'esprit que la volonté bénie du Seigneur lui avait enfin destiné la naissance d'un enfant. Quand la fête fut finie et qu'il était rentré chez lui, il raconta cette histoire à ma mère. Ayant gardé un petit peu des bonbons il les lui donna. Huit mois et 9 jours plus tard j'étais né dans ce monde.
En accord avec le commandement de la Perfection Bénie (Bahá'u'lláh), Siyyid Mihdi Dhaji arriva en Perse puis plus tard traversa Isfahan pour promouvoir la Cause de Dieu. Une grande fête avait été préparée là pour lui et tous les croyants se rassemblèrent autour de lui et l'intérrogèrent vivement afin d'obtenir des nouvelles de la Terre Sainte, et tous les détails concernant la Famille Bénie et le récit de l'emprisonnement des croyants dans les baraques de Saint Jean d'Acre. Parmi ceux qui le questionnaient se trouvait Shms os Zoha, la femme de mon oncle, et un membre de la maison du Roi des Martyres. Elle demanda à Siyyid Mihdi:
"Pendant que vous étiez en présence de Bahá'u'lláh n'auriez-vous pas entendu si une fille quelconque aurait été mentionnée ou choisie pour le Maître `Abdu'l-Bahá ?"
Il répondit:"Non, mais un jour la Perfection Bénie marchait dans les bâtiments des hommes et parlait. Puis Il tourna Son visage vers moi et dit: A part ce discours provenant de la bouche de la Perfection Bénie, non je n'ai rien entendu."
Quand ma tente retourna à la maison et me vit, elle déclara par le Dieu Un, qu'au moment précis où Siyyid Mihdi nous racontait le rêve de Bahá'u'lláh, il lui vint à l'esprit que, sans le moindre doute, j'étais cette fille et qu'avant peu nous constaterions qu'elle avait raison. Je fondais en larme et répondais: Loin de là, car je ne suis pas digne d'une telle bonté. Je vous prie de ne plus jamais prononcer un seul mot à ce sujet, n'en parlez à personne.
(Note du rapporteur : Munírih Khánum continue l'histoire de son voyage jusqu'en Terre Sainte en suivant les instructions successives de Bahá'u'lláh données à ses proches. En route vers leur destination ils rencontrèrent beaucoup d'amis qui tentèrent de les dissuader d'aller en Terre Sainte leur disant qu'en ce moment personne n'était autorisé à aller à Saint Jean d'Acre parce qu'en ce moment des événements tristes et malheureux avaient causé de nouvelles incarcérations parmi les amis, et que les autorités ne permettaient à aucun Bahá'í d'entrer dans la ville de Saint Jean d'Acre.)
...Cette nouvelle nous perturbât beaucoup et nous nous demandions ce que nous devions faire, mais Shaykh Salman nous assura que ces conditions ne s'appliquaient pas à nous, et à travers lui nous nous sentions confiants de pouvoir entrer en Terre Sainte avec la plus grande facilité et la plus grande tranquillité, bien que tous les croyants étaient jetés en prisons et enchaînés.
(Note du rapporteur : Après bien des épreuves et difficultés en chemin, Ils arrivèrent finalement à Saint Jean d'Acre.)
... des membres de la Famille Bénie vinrent nous voir et nous souhaiter la bienvenue. Je retournais avec eux, et pour la première fois me trouvais en présence de la Perfection Bénie. L'état d'extase et de ravissement qui m'envaihissait était au-delà de toute description.
Les premiers mots de Bahá'u'lláh furent les suivants: "Nous vous avons amenée dans la prison à un moment où la porte de la réunion est fermée à tous les croyants. Cela n'est pour d'autres raisons que de prouver à tout le monde le Pouvoir et la Puissance de Dieu."
J'ai habité dans la maison de Kalim pendant près de cinq ans. Pendant longtemps j'ai rendu visite à Bahá'u'lláh et puis je suis retournée chez moi. Chaque fois que Kalim revenait de ses visites à Perfection Bénie , il me parlait de Ses bontés infinies et me rapportait un cadeau de Sa part. Un jour il arriva avec une grande joie qui se dessinait sur son visage. Il dit: "Je vous ai apporté le plus merveilleux cadeau qui soit. Ce cadeau est que, un nouveau nom vous a été donné et ce nom est Munirih (remplie de lumière)."
Puis, arriva... la nuit de noce. J'étais habillée d'une robe blanche qui avait été confectionnée pour moi par les doigts de la Plus Sainte Feuille, et qui m'était plus précieuse que toutes les soies et tous les velours du paradis. A environ neuf heures... je fus autorisée à me présenter devant Bahá'u'lláh. Accompagnée de la Plus Sainte Feuille, j'écoutais les paroles de la Perfection Bénie... Il dit:
"Vous êtes les bienvenues! Vous êtes les bienvenues! Ô vous Ma feuille bénie et servante. Nous vous avons choisie et acceptée pour être la compagne de la Plus Grande Branche, et pour le servir. Ceci est une bonté de Ma part, à laquelle il n'y a pas d'égale; les trésors de la terre et du ciel ne peuvent s'y comparer... Vous devez être très reconnaissante car vous avez bénéficié de cette plus grande faveur et de ce don. Puissiez-vous toujours être sous la protection de Divine."
Si je devais écrire en détail les cinquante années de proximité avec le Bien-Aimé de ce monde (nota : `Abdu'l-Bahá), de Son amour, de sa miséricorde et de sa bonté, j'aurais besoin de cinquante années supplémentaires de temps et d'occasion pour l'écrire. Quoi qu'il en soit, si les mers du monde se transformaient en encre, je ne pourrais rendre justice à ce sujet de manière adéquate...
TEMOIGNAGE DE WILLIAM S. MAXWELL A LA MEMOIRE DE Munírih Khánum
Au cours la Convention des Bahá'ís des États-Unis et du canada qui se tenait en 1938 dans la grande salle de la Fondation du Mashriqu'l-Adhkar à Wilmette, un télégramme de Shoghi Effendi était lu annonçant la mort de Munirh Khanum, plus connue par la plus part des gens sous le nom de Sainte Mère, la bien-aimée femme d`Abdu'l-Bahá.
Les amis présents n'étaient pas préparés à ce choc causé par la lecture de ce télégramme. Beaucoup d'entre nous savaient que Munírih Khánum attendait avec impatience le moment où elle rejoindrait son Bien-aimé 'Abdu'lBahá et nous étions conscients qu'elle avait atteint un âge très avancé; mais cette connaissance n'avait pas pour autant atténué cette profonde sensation de perte ressentie par le départ de cette noble et stimulante femme. Nous réalisions qu'une de ces grandes âmes de l'âge héroïque venait de disparaître. L'atmosphère de la réunion en fut instantanément affectée et dans le souffle de l'esprit qui nous enveloppa, nos coeurs et nos sentiments de sympathie se dirigèrent vers Haifa et le Guardien ainsi que la Sainte Famille.
Durant le printemps 1937, quand notre famille eut l'honneur d'être invitée par Shoghi Effendi dans la maison des Pèlerins de Haifa, je pris plusieurs clichés photographiques privés des membres de la Sainte Famille. Ces clichés furent présentés à Munírih Khánum qui montra beaucoup d'intérêt. Plus tard je fus informée verbalement qu'elle aurait été enchantée que je la prenne en photo.
Un après-midi suivant il me fut demandé d'aller à la maison d`Abdu'l-Bahá de l'autre coté de la rue, en face de la Maison des Pèlerins. Là, j'eus l'honneur d'être reçue par Zia Khanum et d'être présentée à la Sainte Mère et aux autres femmes présentes qui s'étaient réunies dans la salle de réception du fond au fond de la maison. C'est là que certains après-midi il est de coutume pour Zia Khanum et pour d'autres femmes de la Sainte Famille de recevoir des femmes Baha'ies de Haifa rendant visite à des pèlerins. A cette occasion, comme d'habitude en cas de réunion, on servait du thé, et la conversation portait sur des sujets Bahá'ís.
Pour les photos prises cet après-midi là, j'utilisais le plus souvent un petit appareil prêté par Ruhiyyih Khanum, et elles étaient en réalité des prises de groupe desquelles furent exécutés des agrandissements.
Ces photos ont une valeur historique du fait qu'elles sont les seules qui aient été prises durant les dernières années de sa vie. C'est à peine incroyable qu'à l'époque où elles ont été prises Munírih Khánum avait atteint l'âge vénérable de quatre vingt quinze ans. A plusieurs occasions au cours de la réunion La Sainte Mère prononça des paroles qui nous étaient très chères et elle chanta pour nous avec une voix claire et d'une grande beauté. Elle était en réalité une grande âme qui nous faisait l'honneur de l'écouter. La rigueur d'une vie de grandes souffrance et des épreuves subies au coté de son bien-aimé 'Abdu'lBaha, n'avait en rien diminuer la douceur de caractère et la sympathique personnalité de cette noble femme, membre survivant des proches immédiats de la Sainte Famille, en cette grande période durant laquelle la "Foi" vit le jour.
William S. MAXWELLTEMOIGNAGE DE CORINNE TRUE A LA MEMOIRE DE Munírih Khánum
Un Hommage Par Corinne True, Wilmette, IllinoisC'était en Février 1907 que je fis mon premier voyage en Palestine pour rendre visite à `Abdu'l-Bahá alors qu'il était confiné au sein de la "Plus Grande Prison" de Saint Jean D'Acre.
Notre bateau à vapeur arriva dans la baie de Haifa et nous furent transportés jusqu'au quai dans de grosses chaloupes entraînées par des rameurs Arabes. Après avoir franchi la douane Turque nous nous rendions en carriole jusqu'à la maison du Carmel, un très viel hôtel tenu par des Adventistes Allemands.
A Port Saïd en route pour Haifa, Ahmad Effendi Yazdi monta à bord de notre navire, accompagné d'une dame Anglaise Madame Scaramucci, une Baha'ie vivant alors en Grande Bretagne et qui était aussi en route pour rendre visite à `Abdu'l-Bahá. Cette dame et ma fille Anna, et moi-même finirent notre voyage ensemble. Nous devinrent de très grandes amies et partagèrent toutes les expériences précieuses de ce mémorable pèlerinage.
Peu de temps après notre premier repas à l'hospice Allemand de Haifa, en début de soirée, un message nous était délivré par un courrier de l'Agence de Voyage Cook à Haifa. Ce message nous demandait à toutes les trois de remonter l'avenue de quelques bloc, où nous étions attendues par deux frères Bahá'ís qui nous accompagneraient jusqu'à la maison du Maître à Haifa, à quelques six pattés de maison de notre hôtel en remontant la colline.
Quelles nuit ce fut; c'était la pleine lune, le temps était aussi doux qu'en mai, avec partout des fleurs épanouies. Nous rencontrâmes nos deux escortes baha'ies et ils nous guidèrent en silence vers la résidence d`Abdu'l-Bahá, où nous nous trouvâmes en présence d'homme Bahá'ís, selon la coutume Orientale. Ils nous questionnèrent au sujet de l'avancement de la Cause en Amérique et de notre visite avec les Bahá'ís Egyptiens que nous avions vus en Alexandrie. Très rapidement ces hommes s'excusèrent pour puissions rencontrer les Dames de la Maison Sainte d`Abdu'l-Bahá. A cette époque une des fille d`Abdu'l-Bahá, Ruha Khanum, habitait dans la maison du Maître à Haifa parce que les ennemis avaient causé à Constentinople de nouveaux troubles à `Abdu'l-Bahá, ayant pour conséquence de le réincarcérer à l'intérieur de la Vieille Colonie Pénale de Saint Jean d'Acre pour une période de quatre ans. Cela avait été ordonné par le gourvernement Turque.
Quelle généreuse intention de la part de notre Maître bien-aimé de nous envoyer, de Saint Jean d'Acre jusqu'à Haifa, sa femme, la vénérée Munírih Khánum et son jeune petit fils Shoghi Effendi, accompagnés de quelques membres de sa Maisonnée afin de nous souhaiter la bienvenue. Ces Bahá'ís d'aujourd'hui qui auraient connu le Maître en tant qu'homme libre peuvent difficilement comprendre les émotions des premiers pèlerins partant pour la Palestine pour rendre visite au plus Grand Prisonnier du monde, qui fut confiné pendant quarante dans cette terrible Colonie Pénale de Saint Jean d'Acre, et n'ayant goûté à aucun moment de liberté.
Si les autorités locales avaient su qui nous étions, notre sécurité aurait été mise en jeu. Mais la miséricorde de Dieu nous protégea des maux, et répandit sur nous les faveurs sans fin de sa protection. Il nous fut accordé six jours de joie indescriptible en présence des Membres de la Maison d`Abdu'l-Bahá, de Sa femme, et de Sa Famille. Il n'y a pas de mot pour retranscrire à ceux qui lisent ce que j'écris, les émotions ressenties en nos coeurs. Nos pieds avaient à peine foulé le sol du Mont sacré de Dieu quand nous devinrent les récipients de l'amour et de la tendresse paternelle d`Abdu'l-Bahá, et qu'il nous prit au sein de sa Sainte Maisonnée. Sa femme avait fait toute la route de Saint jean d'Acre jusqu'à Haifa pour nous recevoir et pour nous transmettre ses salutations les plus cordiales. Ce fut la Sainte Mère Munírih Khánum qui nous accueillit la première.
Le jour suivant notre arrivée à Haifa nous avons visité le Tombeau du Báb sur une des pentes du Mont Carmel, accompagnées des saintes femmes, et par la suite nous avons dîné avec elles dans la maison du Maître.
Tôt le deuxième matin qui suivit notre arrivée, un messager est venu à la porte de notre chambre d'hôtel et nous dit: "Le Maître à envoyé les paroles suivantes de Saint Jean d'Acre : que trois pèlerins doivent louer une voiture et rouler le long de la baie jusqu'à la maison de Sa prison à Saint Jean d'Acre. Pendant six jours nous étions des invités dans cette maison et nous pouvions voire la Sainte Mère et la Soeur du Maître, la Plus Grande Branche, et avec elles la fille du Maître.
Très tôt dans la matinée il nous avait été accordé de nous retrouver dans une grande salle de réunion où le bien-aimé `Abdu'l-Bahá et Sa Famille se rassemblaient pour une heure de discussion commune. Le Maître demanda à plusieurs membres de la famille de chanter les Paroles Saintes de Bahá'u'lláh toujours en la présence maternelle de Munírih Khánum qui emplissait l'atmosphère de cette pièce de la bénédiction de son grand coeur de mère. Elle semblait être la personnalisation de la Maternité Universelle, vraiment "la Sainte Mère". Un matin alors que je me tenais debout à ses cotés, le cher Maître vint à moi et plaça ma main dans les siennes, et me regardant en face me dit en Anglais: Elle est votre mère (She is your mother).
Quand arriva le moment de quitter cette maison sacrée, la prison d`Abdu'l-Bahá, et que nous devions rentrer en Amérique, ce fut comme si nos coeurs se déchiraient d'avoir à dire "au revoir" à ces membres divinement précieux de la Sainte Famille! Nous fondions en larmes, et ils fondirent aussi en larmes avec nous - à cause de ce départ. Au cours de cette visite sacrée nous avions trouvé en `Abdu'l-Bahá un Père Céleste, et une Mère Céleste en sa femme, Munírih Khánum.
En Novembre 1919, après une période de sept ans, j'ai pu à nouveau faire le pèlerinage en Terre sainte; cette fois-ci dans des circonstances bien différentes. Le gouvernement Turque, qui avait été renversé par le Parti du Progrès des Jeunes Turques, était maintenant passé aux mains du Sultan. Unes des premières choses que fit ce nouveau gouvernement fut de rendre la liberté à `Abdu'l-Bahá, ce qui voulait aussi dire la libération de toute Sa Famille.
Les forces Anglaises commandées par le Général Allenby avaient récemment délivré la Palestine des mains des Turques et toute la Sainte Famille s'était déplacée à Haifa où la vie là était relativement confortable après les terribles rigueurs d'emprisonnement pendant tant d'années.
Durant ce second pèlerinage il nous était possible d'avoir une plus grande intimité avec la Plus Grande Branche et la Sainte Mère, Munírih Khánum. Nous étions reçues par elle presque chaque jour dans le jardin du Maître, où des questions nous étaient posées et des instructions données, mettant au clair beaucoup de points qui avaient tourmenté les amis Américains. Nous y virent cette femme bien-aimée d`Abdu'l-Bahá comme étant la plus merveilleuse des enseignantes, et par elle nous grandissions dans la connaissance de la Cause. Au début, un des plus grands privilèges des femmes pèlerins en visite était cette association intime avec ces deux servantes divines de Bahá'u'lláh, Bahiyyih Khanum, La Plus Sainte Branche, et Munirúh Khanum, la Sainte Mère. Nous ne voyions rarement l'une sans l'autre.
Ces saintes femmes avaient tout sacrifié pour devenir les compagnes de Bahá'u'lláh et d`Abdu'l-Bahá pendant Leur emprisonnement. Pouvions-nous trouver dans tout l'univers un plus grand privilège que celui-ci: de s'asseoir aux pieds de ces saintes femmes; de les entendre, en personne, raconter le passionnant récit de leur vie en prison, de voire comment Dieu les soutenait, privées de toute nécessité vitale, et d'apprendre qu'elles voyaient cette vie en prison auprès de la Perfection Bénie et d`Abdu'l-Bahá comme ayant pour elles une valeur infiniment plus grande que tous les conforts et les luxes de la vie. Ces femmes sont des grandes héroïnes de Dieu et nous étions bien conscientes des grands privilèges dont nous bénéficions en leur présence. Les graines de conviction que ces associations avaient fait germer en nos âmes, avaient planté les racines d'une foi qui nous poussait chacune d'entre nous à retourner dans le monde extérieur et à lever l'étandards du Plus Grand Nom aux yeux de tous.
Au cours de notre seconde visite nous vîment Munírih Khánum non seulement comme une mère Universelle aimant chacun des enfants de Dieu, mais aussi comme une grande éducatrice et enseignante des principes de Bahá'u'lláh. Elle était une enseignante qui vivait ces principes devant nos yeux. L'histoire de la religion n'a jamais connu de plus grands exemples que ceux de la dévotion et du sacrifice donnés par les Messagers Divins de Dieu! Devrions-nous louer Dieu tout au long des siècles à venir que nous ne pourrions rendre suffisamment louange à l'inestimable héritage spirituel que ces saintes femmes nous ont laissé. Elles sont les modèles pour la femme Baha'ie de ce monde.
CORINNE TRUEMunírih Khánum! Oh combien ce nom est aimé dans ce monde Baha'i! Les circonstances uniques de sa naissance semblent déjà nous annoncer qu'elle était destinée à prendre une place dans l'histoire de la Foi Baha'ie. Cette prophétie fut accomplie quand elle fut choisie pour être la femme aimée et honorée de notre Maître bien-aimé, `Abdu'l-Bahá. Avec un consentement rayonnant elle a partagé avec Lui les vicissitudes, les épreuves et les tribulations qui furent son sort durant les longues surveillances sous le stricte "Régime Turque" dans la "Cité rempart" de Saint Jean d'Acre.. Combien son coeur a du se réjouir quand, par le renversement du Gouvernement Ottoman, il devint possible pour les amis de divers pays, de venir lui rendre visite et converser avec elle.
Les pèlerins de l'Est comme de l'Ouest, durant leurs séjours à Haifa, se souviendront toujours de ces heures heureuses passées en sa compagnie. Ils garderont pour toujours, gravées dans leur mémoire, ces images de leur première rencontre avec elle dans le salon du Maître. Ils la reverrons assise à coté de sa belle soeur bien-aimée Bahiyyih Khanum (La Plus sainte Feuille) en compagnie de membres de sa famille et des femmes et des enfants de la communauté Baha'ie; ils se souviendrons de son doux et ardent visage tandis qu'ils entraient en sa présence, et ils entendrons sa voix mélodieuse les accueillant et les invitants à s'asseoir auprès d'elle.
S'assurant toujours en premier lieu de leur santé physique et du confort de leur corps, elle revenait ensuite aux questions les plus importantes à son esprit, et s'empressait de s'informer des progrès de la Foi Baha'ie dans leur pays et tandis qu'ils relataient les divers activités et la propagation des enseignements dans ces pays, sa face spirituellement illuminée devenait rayonnante de joie.
Elle aimait rassembler les femmes et les enfants autours d'elle, et de sa douce voix chantait avec eux les paroles Saintes et les poèmes écrits en louange à son Bien-aimé.
Elle était le pur exemple du disciple fidèle de Bahá'u'lláh, si fermement et si solidement attachée à Son pacte et à son Testament. Son esprit radiant était toujours prêt quand viendrait le moment de mourir, et joyeusement prendre son envol vers le "Royaume du concours Suprême" pour y rejoindre ses aimés. Les membres de sa famille, ceux qui lui furent si intimement attachés, et les nombreux pèlerins dont le privilège fut de la rencontrer, vécurent à travers son départ une expérience douloureuse. C'était comme si il leur était demandé de jouer dans la "Grande Symphonie de la Vie" un accord qui était trop difficile pour eux. Le rhytme semblait soudainement interrompu, mais à la pause, des oreilles attentives entendaient la voix du "Grand Chef d'Orchestre" leur dire: "Continuez à jouer! cela fait partie de l'accord. J'ai fait pour vous de la mort une messagère de joie. Pourquoi donc vous lamentez-vous?" Encore une fois nous reprenons le thème, et avec des cordes vibrantes nous jouons de doux accords mélodieux, chantant à l'unisson, "Il n'y a pas de mort! Il n'y a pas de mort!"
Sur les pentes de Carmel (la Montagne sacrée de Dieu) la dépouille mortelle de Munírih Khánum repose avec amour auprès de la tombe de sa bien-aimée et vénérée belle-soeur Bahiyyih Khanum (la Plus Sainte Feuille), et non loin de la tombe Sainte où repose la dépouille Sacrée du Báb et d`Abdu'l-Bahá.
A travers les âges avenir, des milliers de pèlerins rendrons visite à son lieu de repos, et se tenant debout la tête baissée, ils prieront avec révérence et ferveur: "O Dieu! O Dieu Assistes-nous des Hôtes du Concours Suprême. Et rends nous ferme et constants dans ton Pacte et Ton Testament."
EFFIE E. BAKER