Alors que partout éclatent des conflits intérieurs de plus en plus fréquents, la communauté internationale ressent l’urgence de s'attaquer à la question des minorités. Tous les pays ayant une minorité quelconque en leur sein, les gouvernements commencent à se demander si elle ne représente pas en germe un élément d'instabilité plus répandu qu'il n'y paraissait jusqu'à maintenant. Rien de plus indiqué donc aujourd'hui que d'inscrire la question des minorités à l'ordre du jour de l'ONU. La Déclaration relative aux droits des Personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses et linguistiques, adoptée il y a un peu plus de 5 ans, a considérablement contribué à faire avancer le débat, en formulant des normes internationales. Non seulement elle proscrit la discrimination à l'égard des minorités, mais affirme aussi la nécessité d'encourager et de sauvegarder la diversité culturelle, linguistique et religieuse à l'intérieur des pays. La norme ayant été posée, il ne reste plus qu'à l'appliquer. A cet égard, la Communauté internationale baha'ie est heureuse de constater que le groupe de travail sur les minorités, instauré par la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, met peu à peu en place des mesures destinées à suivre l'application de la déclaration et à régler les problèmes soulevés par sa mise en œuvre.
La Communauté internationale baha'ie estime que tant les minorités que les majorités ont la responsabilité de veiller à l'application de l'égalité des droits à l'égard des minorités. Il incombe néanmoins plus particulièrement aux groupes qui sont au pouvoir (qu'ils soient issus de la majorité ou d'une minorité) d'effectuer, dans un souci de justice, les ajustements sociaux et politiques nécessaires au plein exercice, par les autres composantes de leur société, de leurs droits communs et fondamentaux. Quant aux autres groupes, ils sont moralement tenus de mériter les efforts sincères déployés à leur égard, et de reconnaître, accepter et remplir leurs responsabilités envers l'ensemble de la société. Face aux problèmes qui ne manqueront pas de surgir, tant les majorités que les minorités devront tenir compte de l'interdépendance croissante du monde, où l'intérêt de la partie réside dans celui du tout et où le tout ne peut s'épanouir tant que des parties sont maintenues dans l’oppression ou le besoin.
L'impulsion doit venir des gouvernements, qui devront prouver leur volonté d'accorder aux minorités les mêmes droits que ceux dont bénéficient les autres citoyens. Pour ce faire, ils pourraient examiner dans quelles conditions certaines minorités tendent à se trouver exclues et adopter des lois pour y remédier. Si les lois représentent une avancée majeure, elles ne suffisent jamais à mettre fin au traitement discriminatoire des minorités. Il faut que les comportements changent. Les groupes doivent apprendre à se considérer de manière radicalement différente. Ils doivent s'estimer en partenaires, en collègues, aussi dignes de respect et d'égalité de traitement les uns que les autres. Les majorités doivent cesser de se prétendre titulaires de tous les droits, et les minorités se libérer du sentiment d'impuissance et de suspicion dû à une discrimination prolongée.
Les lois peuvent effectivement faciliter les changements d'attitude, en sanctionnant des comportements jugés jadis acceptables. Dans la mesure où elles poussent les individus à modifier leurs comportements, elles les incitent aussi à remettre en cause les croyances qui les sous-tendent et à réfléchir aux principes qui devraient régir les nouvelles attitudes. Cependant, seule une transformation des cœurs et des esprits permettra d'éradiquer définitivement le sentiment de haine à l'égard de ceux que nous percevons différents de nous. Et seule l'influence de principes moraux et spirituels peut opérer ce changement en profondeur. La paix, l'harmonie et la stabilité du monde reposent sur le principe de l'unicité de l'humanité. Méconnaître ce principe nous rend vulnérables aux peurs et haines irrationnelles si facilement attisées par le mensonge, les demi-vérités, les distorsions et les accusations incendiaires proférées par des dirigeants peu scrupuleux, attachés à leurs propres intérêts.
Cependant, unité ne signifie pas uniformité; au contraire, croire en l'unicité de la famille humaine engage à respecter sa diversité. Pour aller vers un monde uni dans sa diversité, il faut apprendre aux enfants à y voir une source de richesses et non une menace. La Communauté internationale baha'ie félicite donc le groupe de travail de s'être attaché à promouvoir l'éducation multi et inter-culturelle. Pour elle, reconnaître dans la diversité culturelle l'expression multiple de notre humanité commune est une des clés de la résolution pacifique et durable des conflits où interviennent des minorités. Les auteurs des programmes scolaires devraient s'attacher à rendre caduques les animosités d'ordre ethnique, linguistique et religieux, et promouvoir la connaissance des différentes cultures de chaque pays, de façon à mettre en valeur les aspirations communes qui nous relient les uns aux autres, en qualité de membres de la famille humaine. Un enfant formé à apprécier les qualités humaines fondamentales présentes dans une large palette de cultures, n'hésitera pas à considérer chacune d'elles comme une source de richesse pour l'ensemble de la société. Il sera aussi beaucoup moins exposé à la manipulation de ceux qui dressent les groupes les uns contre les autres, pour mieux servir leurs intérêts politiques.
La Communauté internationale baha'ie est persuadée que si l'on veut voir couronnés de succès les efforts des Nations Unies et des gouvernements en faveur des droits de l'homme, il faut que pouvoirs politique et juridique, spirituel et moral conjuguent leurs influences. Pour sa part, elle tente de relever le défi en s'employant à promouvoir les minorités représentées en son sein à travers le monde. En effet, leur croyance engage les communautés baha'ies à aller au-delà de la simple tolérance à l’égard des minorités, et de les cultiver, les encourager et les protéger, quelle que soit leur nature, ethnique, nationale ou religieuse. Ainsi les écrits Bahá'ís stipulent-ils que si une discrimination quelconque est tolérée, elle doit s exercer en faveur de la minorité. Inspirés par les principes unificateurs de l'ordre mondial instauré il y a plus d'un siècle par Bahá'u'lláh, les communautés baha'ies du monde s'efforcent ainsi d'intégrer des peuples de toutes origines ethniques, nationales et religieuses en une seule communauté, unie et diverse à la fois..
La Communauté internationale baha'ie poursuivra sa collaboration avec le groupe de travail sur les minorités, et partagera volontiers avec lui l'expérience acquise à unir les communautés dans le respect de leur diversité.